Pourquoi je n'aime pas particulièrement les Shortybulls, les Frenchtons et les Doodles (partie 2)
Publié le June 29th, 2020
Lorsque j’ai écrit la première partie de cet article, plusieurs personnes ont souligné qu’elles auraient souhaité que je parle de la santé de ces chiens et de l’absence de garanties. Un post sur un autre groupe demandant à quoi ça servait un enregistrement, m’a inspiré l’explication qui suit. Par contre, attachez vos tuques avec de la broche : je ne pensais jamais parler de santé, de chiens de designers, de micropuce, de garanties, d’Airbnb et de traçabilité dans un même article…
Je n’apprendrai rien à la plupart des gens en mentionnant qu’il y a beaucoup de maladies et de problèmes de santé héréditaires liés à plusieurs races de chiens et que le meilleur moyen de les contrôler, tout comme la pandémie actuelle, c’est de multiplier les procédures de dépistage, de tester en masse et d’isoler les individus qui sont atteints ou porteurs.
Ceci étant dit, toutes les races de chiens ne partagent pas les mêmes problèmes de santé. En général, les Clubs de race, de concert avec la Orthopedic Foundation for Animals , établissent une liste des tests de dépistages des maladies héréditaires qui affectent une race en particulier. Par exemple, alors que les coudes, les hanches et la myélopathie dégénérative sont des préoccupations constantes chez le berger allemand, la population de bouledogue français doit être suivie notamment pour ses problèmes de rotules et de cataractes héréditaires.
Bref, la liste, pour chaque race, diffère. Ce qui rend le dépistage pour un chien issu d’un croisement de races, plus difficile. Dans le cas d’un goldendoodle, doit-on suivre le protocole de dépistage pour un golden retriever ou pour un caniche? Le coût des tests étant relativement élevé, l’éleveur se trouve alors devant un dilemme. Tester l’ensemble des maladies qui affectent les deux races ou faire du cherry picking et tester de manière aléatoire? Malheureusement, c’est souvent la deuxième option qui est privilégiée…
En fait, on croit souvent, à tort, que les chiens croisés ont une meilleure santé que les chiens de race pure. Cela n’est malheureusement pas le cas, car les maladies héréditaires les plus fréquentes sont les malformations des articulations, les troubles cardiaques, les anomalies oculaires et les affections cutanées qui affligent un grand nombre de races. Aussi, une mauvaise sélection des reproducteurs engendre des anomalies héréditaires à long terme et ce, peu importe la race. Par ailleurs, un bon éleveur va normalement connaître le patrimoine génétique de ses lignées. Ainsi, il dispose de renseignements sur la santé de ses chiens sur plusieurs générations, ce qui permet d'extrapoler au sujet de l'état de santé d'un reproducteur en particulier. Lorsqu’on élève des chiens issus de deux races différentes, il est plus rare que l’éleveur connaisse le patrimoine génétique de ses reproducteurs et de leurs ancêtres de manière à pouvoir faire un choix plus judicieux dans la cadre d’une reproduction planifiée.
Ne pas tester des chiens qu’on entend mettre en reproduction, c’est un peu comme faire ce que le président Trump préconise…cela permet de réduire le nombre de cas répertoriés, mais cela équivaut aussi à ignorer le problème plutôt que de chercher à le régler.
Mais au-delà de ces considérations, il faut rappeler que le dépistage de maladies héréditaires, qu’il s’agisse de chiens croisés ou de chiens de race pure, devrait systématiquement être fait. Il faut cependant garder en tête qu’un chien, c’est du vivant et que malgré toutes les précautions que prennent les éleveurs, personne n’est à l’abri d’avoir un chiot qui a une malformation. Néanmoins, les tests de santé sur les reproducteurs constituent encore le meilleur moyen de faire de la prévention et de réduire les risques.
Ceci étant dit, quel est le rapport entre les tests de santé et l’importance de l’enregistrement du chien auprès du Club canin canadien («CCC»)?
La réponse est simple : la traçabilité.
Dans ce fameux post où les gens se questionnaient sur la pertinence de faire l’acquisition d’un chien enregistré, nombreux sont ceux qui affirmaient qu’il n’y avait pas de différence puisque malgré le fait que le chiot ne soit pas enregistré, il était néanmoins micropucé et l’éleveur avait donné une garantie de santé. Cependant, ce n’est pas tout à fait le cas, car il existe une nuance et elle est importante.
La croyance populaire veut que l’on fasse micropucer un animal afin de pouvoir le retrouver facilement en cas de perte ou de vol. C’est effectivement le cas pour un chien qui n’est pas enregistré au CCC. Le numéro de micropuce est inscrit dans les registres de la municipalité, ou ceux du fabricant de micropuces, mais l’information qui est contenue à ces registres se limite souvent aux coordonnées du propriétaire de l’animal.
Lorsqu’un chien est enregistré au CCC, il doit obligatoirement être micropucé ou tatoué (bien que cette dernière méthode soit désuète). Le numéro de micropuce ne sert pas uniquement à identifier le propriétaire du chien : en fait, ce numéro donne une foule d’informations sur le chien – de sa date de naissance à sa généalogie complète – mais surtout, il permet de retracer son éleveur.
Partant de ce principe, aucun éleveur ne peut se déresponsabiliser face à un chiot qu’il produit. La micropuce et le registre du CCC constituent une preuve inéluctable qu’une personne a bien produit un chiot. Ceci a des conséquences importantes sur la valeur de la garantie de santé qui vous est offerte.
En effet, la grande majorité des éleveurs offrent une garantie de santé qui souvent se traduit par le remplacement du chiot. D’autres éleveurs peuvent offrir de compenser en partie les frais vétérinaires. Les acheteurs se sentent à l’abri parce qu’il y a une garantie. Mais un bon avocat vous dirait qu’avoir une garantie c’est bien beau, encore faut-il pouvoir la faire exécuter quand survient un problème de santé…
Lorsqu’un chien est vendu sans enregistrement et sans contrat, il devient alors difficile, voire impossible, de faire valoir ses droits auprès de la personne qui a vendu le chien. Cela est d’autant plus vrai si la livraison du chien se fait dans un stationnement ou un endroit public, ce qui est chose courante pour le bouledogue français où de plus en plus d’éleveurs, craignant les vols, refusent de divulguer leur adresse. Mais saviez-vous que certains vendeurs louent maintenant des maisons sur Airbnb le temps d’un week-end afin de vendre leurs chiots? Cela paraît bien, met le client en confiance et permet à cet éleveur peu scrupuleux de disparaître le lundi suivant. Je ne compte plus les témoignages de gens qui ont vu leur éleveur s’évanouir dans la nature et dont le numéro de téléphone et le profil Facebook ont soudainement été bloqués. Dans cette mesure, comment alors faire valoir votre garantie?
La réalité, c’est que c’est une question de tolérance au risque. En effet, il est fort probable que votre chiot soit en santé et que vous n’ayez pas à demander à l’éleveur d’honorer sa garantie. Mais lorsqu’on débourse 3, 4 ou 5000$ pour un chiot, est-ce véritablement un risque qu’on est prêt à prendre? C’est très facile de se faire bercer par l’illusion qu’on a fait affaire avec un éleveur responsable parce qu’on a une garantie. Mais c’est bien plus facile d’acheter un chien et une tranquillité d’esprit : choisissez un éleveur responsable et un chiot enregistré au CCC.